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[Lect. II.]
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RIG-VÉDA. — SECTION TROISIÈME.

sée, grandissent et viennent ici accomplir leur devoir.

3. C’est dans le sacrifice que ces (sages) par leurs œuvres mystérieuses ont donné de la force au Ciel et à la Terre ; qu’ils les ont étendus et fondés sur de larges bases ; qu’ils en ont maintenu et consolidé tout le vaste ensemble.

4. Tous ces (sages) ont placé (Indra) sur son char et l’ont entouré de splendeur. Le (dieu) va tout revêtu de lumière, et brillant par lui-même : il porte le grand nom de fécond Asoura[1]. Il a toutes les formes, et s’élève aussi au-dessus des (Ondes) immortelles (en qualité de Varouna).

5. Ce (dieu) puissant, antique et premier-né, a enfanté ces Ondes abondantes qui lui appartiennent. Rois fils du Ciel, vous puisez votre force dans les prières du brillant sacrifice.

6. Ô rois, vous êtes l’ornement des trois assemblées dans lesquelles nos nombreuses libations vous honorent. Oui, je vous vois des yeux de l’âme, Indra, tu apparais dans le sacrifice ; tu t’approches de ces flammes[2] dont le vent agite la chevelure.

7. Sous les noms divers qu’ils ont donnés à ce (maître) bienfaisante, les (Richis) lui ont mesuré le lait de la vache (du sacrifice). Prenant tour à tour chaque énergie[3] divine, ces (sages) magiciens en ont fait une forme dont ils ont revêtu Indra.

8. Il n’est personne qui ne soit à l’abri sous cette forme d’or de Savitri[4], que ma Prière a créée. Comme une femme (embrasse) ses enfants, elle enveloppe le Ciel et la Terre, qui s’étendent au loin dans l’immensité. Tel est le fruit de nos hymnes.

9. Quand le vieux (prêtre) accomplit (le sacrifice), quand le seigneur traite les dieux, soyez auprès de nous, (Indra et Varouna). Le monde voit les œuvres variées de ce (divin) magicien, (de cet Indra) aussi bon[5] qu’il est fort.

10. Appelons à notre secours, au sein de ce sacrifice, le grand et magnifique Indra, le plus noble des héros au milieu du combat, aussi clément que terrible, vainqueur de ses ennemis sur le champ de bataille, et couvert de leurs dépouilles.


HYMNE X.

À Indra, par Viswâmitra.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. La Prière, qui part du cœur et qu’embellit l’imagination, s’élève vers le grand Indra. Elle s’éveille pour le sacrifice, et s’écrie : « Indra, écoute ce qui m’est inspiré pour toi. »

2. La Prière semble naître du Ciel avec l’Aurore ; elle s’éveille pour faire entendre sa voix dans le sacrifice. Antique, fortunée, connue de nos pères, elle prend (au matin) ses vêtements argentés.

3. La (Prière), placée sur la langue (du prêtre), enfante deux jumeaux[6]. À peine sont-ils nés, que ces jumeaux rassemblent les formes des choses ; ils tuent les ténèbres, avant-coureurs de (l’Astre) lumineux.

4. Qui peut blâmer ces (Richis)[7] qui furent nos pères sur la terre, et qui combattirent pour nous donner les vaches (célestes) ? C’est Indra, qui, fameux par ses nobles prouesses, a délivré pour eux ces vaches fécondes.

5. Indra, et ses amis, les pieux (Angiras), habiles à chanter sur des mesures de neuf syllabes[8], ont suivi les vaches dans la (prison) où elles étaient couchées. Bienfait inestimable ! Avec les dix (Angiras) qui chantent sur des mesures de dix syllabes, il a découvert le Soleil, qui habitait les ténèbres.

6. Il a découvert ce breuvage aussi doux que le miel que donne la vache (céleste) au large sabot, au pied rapide. Bienfaiteur opulent, il a de sa main droite saisi le mystérieux (Asoura), caché au sein des eaux.

7. Daigne arracher aux ténèbres l’Astre lumi-

  1. Ce mot, pris ici en bonne part, désigne l’être qui donne la vie, c’est-à-dire le Soleil. Indra est à la fois l’Aditya du jour et l’Aditya de nuit, autrement Indra et Varouna. Plus loin le poëte appelle Indra et Varouna fils du Ciel (divo naptri), parce qu’en leur qualité d’âditya ils parcourent l’air le jour et la nuit.
  2. Ces flammes reçoivent le nom de Gandharva.
  3. Asouryam.
  4. Indra prend le nom de Savitri (créateur), qui appartient ordinairement au Soleil.
  5. L’expression sanscrite est pittoresque (gopâdjihwa). Quand la vache est rassurée, elle lèche son maître, à qui, dans cette circonstance, conviendrait parfaitement l’épithète latine blandus.
  6. Ces jumeaux sont les Aswins.
  7. L’auteur désigne les Angiras.
  8. Voy. page 80, col. 1, note 6, les différents sens que l’on peut donner à ce passage. Il y a deux classes d’Angiras, les uns, à ce qu’il paraît (sect. I, lect. V, hym. I, vers 4), au nombre de sept, et les autres au nombre de dix, comme il résulte du passage présent. Le commentateur cite, parmi les Angiras, Médhâtithi, et ne voit dans ces Richis que deux classes de pénitents.