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Page:Launay, Dallet - La Corée et les missionnaires, 1901.pdf/184

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« Pourquoi, dit-il, allez-vous vous perdre dans les superstitions ?

— Nous ne sommes point perdus dans la superstition, répondit Paul.

— La religion que l’on appelle du Maître du ciel, n’est-ce point une superstition ?

— Dieu est le créateur du ciel et de la terre, des anges et des hommes, et de toutes les créatures. Le servir est-ce une superstition ?

— De qui as-tu reçu tes livres ?

— Je pourrais l’indiquer. Mais, quand je reçus ces livres, la défense du roi n’existait pas encore. Celui donc qui me les prêta n’était point coupable, Aujourd’hui qu’il y a défense rigoureuse, si je le désignais, il serait exposé, sans aucune culpabilité de sa part, à de cruels supplices. Comment pourrais-je le déclarer sans enfreindre le précepte qui nous défend de nuire à notre prochain ? Donc je ne puis, ni ne veux le dénoncer.

— Vous êtes tous coupables, vous autres chrétiens, d’un crime que le ciel et la terre ne pourraient contenir. Vous ajoutez follement foi à des paroles trompeuses ; vous infatuez le monde et débauchez le peuple ; vous détruisez et faussez les relations naturelles de l’homme. C’est une grande impiété. Cependant cette faute est relativement légère. Il est dit, en effet, dans la dépêche du roi, que vous ne faites plus les sacrifices et même que vous avez brûlé vos tablettes pour empêcher les visiteurs de venir rendre leurs devoirs aux défunts. Enfin vous ne rendez pas même à vos parents les honneurs de la sépulture, et cela sans rougir et sans vouloir revenir à de meilleurs sentiments. Cette conduite est digne d’une brute. Livrez vos livres et déclarez vos coreligionnaires. Voyons, déclarez tout, et sans rien déguiser. »

L’interrogatoire continua longtemps encore, mais sans qu’on pût rien arracher de compromettant aux vaillants confesseurs. Tous deux répondaient avec douceur et prudence à toutes les questions et réfutaient une à une toutes les charges de l’accusation.

« Voyons, parmi vous, s’écria à la fin le grand mandarin, il