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« Les nobles, depuis de longues années, étaient divisés en quatre partis. Les deux principaux étaient celui des No-ron et celui des Nam-in, qui, à leur tour, s’étaient subdivisés en deux camps, celui des Si-pai et celui des Piek-pai. Les Si-pai, soit de la faction Nam-in, soit de celle des No-ron, étaient entièrement dévoués au roi, et le soutenaient contre les vues ambitieuses et personnelles des Piek-pai, toujours disposés à faire de l’opposition à l’autorité de leur souverain. Les ennemis les plus acharnés des chrétiens étaient des Piek-pai. Les Nam-in Si-pai étaient moins nombreux. Ce fut parmi eux que la religion se développa d’abord, et, quoique plusieurs de leurs chefs eussent abandonné la foi afin de conserver leurs emplois, eux, du moins, n’étaient point hostiles aux chrétiens. »

Cette situation des partis politiques en Corée, à la mort du roi Tsieng-tsong, jette du jour sur les causes des persécutions qui, bientôt après, firent tant de victimes. Le roi, en effet, redoutait l’esprit révolutionnaire des Piek-pai, dont le nombre et l’audace croissaient tous les jours. Il favorisait au contraire le parti des Nam-in Si-pai, parmi lesquels il trouvait des hommes intelligents et dévoués à sa personne.

À la mort du roi, la régente prit elle-même en main la direction des affaires, au nom de son fils encore enfant. Tandis que les ministres étaient réunis, elle abaissa la grille à bambous qui la séparait d’eux et leur signifia ses volontés. Pour fortifier son autorité, elle retira les charges à ceux qui tenaient contre elle, pour les confier à d’autres plus dociles et spécialement à leurs ennemis politiques, les No-ron Piek-pai. Comptant sur leurs rancunes politiques et religieuses et afin de se lier davantage, à peine le délai légal fixé pour le deuil du roi écoulé, elle lança un violent édit contre la religion chrétienne et ses disciples.

La haine de la régente fut bien secondée. La proclamation de cet édit fut comme une torche enflammée dans toute la Corée. Partout où il y avait des chrétiens, on fit des arrestations. Sous prétexte de rébellion, on alla même jusqu’à forcer les maisons des nobles et, contre tous les usages, on traîna même des femmes et des jeunes filles devant les tribunaux. Sous les efforts de cette