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Page:LeMay - Fêtes et corvées, 1898.djvu/66

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FANTÔME

— Jean-Paul… Mon pauvre enfant !… Mon Dieu ! c’est-il possible ?

Et tout le monde se mit à parler à la fois.

C’était un bruit sinistre de plaintes, de regrets, de soupirs, de sanglots. Mathias eut un moment de frayeur. On l’entendit murmurer entre ses dents serrées par le dépit :

— Ai-je été assez bête ?

Cependant on crut bien que ce mouvement de colère venait de la peine qu’il causait à cette brave famille Duvallon. Il s’en voulait. Il ne pouvait toujours plus se taire maintenant. Il fallait tout dire. Le mal, au reste, n’en serait pas plus grand ; le coup était porté.

Il se remit. Il reprit son assurance et retrouva sa verve.

— Voici, continua-t-il, il ne faut jamais se hâter de publier les mauvaises nouvelles. Pourquoi faire pleurer les gens aujourd’hui, si l’on peut attendre à demain ? Voilà pourquoi j’ai été discret. Et puis, il n’est pas sûr que Jean-Paul ait été tué. Il peut revenir. Vous savez, dans ces immenses prairies on se perd, on s’égare, on prend des routes qui ne conduisent pas toujours où l’on veut aller. Il est peut-être dans les mines, à piocher de l’or,