Page:LeMay - L'affaire Sougraine, 1884.djvu/261

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
263
l’affaire sougraine

percutait dans son cœur. Quand elle passa près de lui, il la regarda furtivement.

— Comme elle est belle ! fit-il… Au moins, j’espère qu’elle m’a vu… Elle va me croire dévot… C’est une bonne idée que j’ai eue là…

Il sortit avec l’intention de la rejoindre. Comme il en approchait, Rodolphe débouchait de la rue Ste Marie, et les deux jeunes gens se donnèrent une poignée de main longue et forte qui fut comme un serrement de tenailles pour l’âme du notaire. Il ralentit le pas, car il ne voulait point être vu. Nulle situation n’est pénible comme celle d’un amoureux qui se trouve en présence de l’objet de son amour et d’un rival fortuné.

Rodolphe dit à Léontine qu’il partait pour St Raymond. Il allait emmener sa tante et sa cousine. Ils vivraient tous trois ensemble. La tante était mieux ; elle pouvait supporter le voyage. Léontine savait déjà le projet du jeune homme. Elle dit qu’elle allait bien s’ennuyer de se voir seule, abandonnée en quelque sorte de ceux qu’elle aimait le plus au monde, mais qu’elle irait les voir. Oui, elle irait bien sûr… Et ils viendraient eux aussi ; ils viendraient souvent, le chemin de fer serait construit bientôt ; ce serait facile.