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Page:LeMay - L'affaire Sougraine, 1884.djvu/336

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l’affaire sougraine

la peur, les terreurs, l’ignominie… Et tout cela dansait, glissait, s’agitait lugubrement, confusément comme les cendres et les charbons d’un âtre immense où passe un souffle de tempête. Le ministre continuait toujours avec méchanceté :

— Je crois que je sais où la prendre, cette jolie femme aux yeux bleus ; car elle avait les yeux bleus, la jeune Elmire. Elle aura vieilli un peu. Les femmes même les plus aimables sont soumises à cette inéluctable loi ; mais je parie qu’on pourra la reconnaître encore. Il reste toujours quelque chose des traits de la jeunesse sur les visages les plus vieux. On soulève les rides et les teintes roses des fraîches années apparaissent encore. Qu’est-ce que je fais ? parler de rides, c’est absurde. Elmire n’a pas plus de 40 ans maintenant, l’âge de la beauté parfaite, votre âge, madame, j’en ferais le pari… Voyons, dites, est-ce que je me trompe beaucoup ?

— Vous êtes bien cruel, monsieur, dit Léontine et vous n’avez pas la générosité d’un gentilhomme.

Elle se leva pour sortir.

— Je puis laisser échapper Sougraine, madame, si vous le désirez, vous n’avez qu’à parler.

— La clémence est une vertu divine, dit encore