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Page:LeMay - Picounoc le maudit (2 tomes en 1 volume), 1878.djvu/94

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PICOUNOC LE MAUDIT.

vient plus que comme un étranger. Il entre il sort, sans sourire, sans donner un regard de pitié à la femme infortunée qui se meurt d’ennuis et de douleur. Seul, comme un dernier rayon de lumière dans le ciel orageux, un bel enfant joue assis sur le plancher couvert de catalognes. Oh ! elle est bien triste la maison de Joseph Letellier ! elle est bien triste, en ces beaux jours, quand toutes les autres maisons se remplissent de bruits, de chants et d’amour…

La jalousie est une véritable folie, et celui qui en est atteint est bien à plaindre. Il perd la lucidité d’esprit, et son jugement devient faux. Il souffre mille morts, rend les autres malheureux, mais s’inflige à lui-même le plus cruel des martyres. Celui qui souffle ce poison dans l’âme de son semblable est plus coupable que s’il versait le sang… Picounoc voyait depuis longtemps le ravage dont il était cause ; mais il ne se laissait pas attendrir par tant de souffrances ; et puis, il fallait qu’il en fût ainsi pour qu’il arrivât à la possession de cette femme aimée que le malheur rendait plus admirable encore. Lorsqu’il rencontrait Joseph, et cela arrivait souvent, il ne manquait pas de lui parler de Noémie : il prenait un véritable