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Page:LeMay - Tonkourou (nouvelle édition de Les Vengeances), 1888.djvu/162

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tonkourou


— Du sang ! du sang ! dit elle enfin d’une voix rauque,
En secouant d’horreur sa chevelure glauque…
Pourquoi vous levez-vous, bataillons valeureux ?
Des traîtres vous vendront… Du sang ! du sang sur eux !…
Ténèbres du cachot, lueurs de l’incendie,
Je vois tout ! Patriote, en ton exil mendie
Les soins de la pitié, le pain qu’on jette aux chiens…
Mais le temps fuit. Tes maux enfanteront des biens…

Alors on vit frémir la méchante sorcière.
Elle se tut. Son œil fixé sur la poussière
Qui flottait au plafond, dans un jour incertain,
Paraissait contempler un spectacle lointain.

— Un demi-siècle passe et j’aperçois encore
Des Judas, reprit-elle !… Et la croix les décore !
Ils t’offrent, mon pays, des sacrifices faux !
Ils ont du sang aux mains, le sang des échafauds !…

 

Quelle est cette phalange ?… On lui crie Anathème ;
Elle grossit toujours. Comme un autre baptême
Le sang du patriote a coulé sur son front.
Elle aime la patrie et venge son affront.