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XIV


Délices et tristesses de l’amour, pensait Lucette, qui descendait l’escalier de Jean. Dehors, la rue froide et sombre l’accueillit. Il n’était que quatre heures, mais en décembre le jour meurt si tôt.

Elle quittait Jean et, tout de suite étreinte de regrets, désirait le moment où elle remonterait cet escalier, retrouverait la chambre du malade, les livres qu’elle feuilletait pendant qu’il lui parlait, et ce doux silence qu’ils gardaient tous deux parfois sans cesser d’être heureux.

Il lui faudrait laisser passer plusieurs jours avant de revenir, à cause des convenances déjà bien menacées. Normalement, une jeune fille honnête ne va pas ches un jeune homme. Lucette qui d’ordinaire allait partout à son gré, par scrupule, parla de ces visites à sa mère. Elle dut tenir tête à beaucoup d’incompréhensions, de malaise, d’inquiétude. Comment convaincre les gens d’expérience qu’un geste peut s’écarter des convenances sans être répréhensible ? Qu’il peut même n’offrir rien de clandestin et constituer une bonne action ? Visiter les malades, n’était-ce pas une œuvre de miséricorde ? Et à côté du bureau de