Aller au contenu

Page:LeNormand - La plus belle chose du monde, 1937.djvu/189

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
CHOSE DU MONDE
[ 187 ]

pénombre, les pieds remontés sur les fauteuils, à l’aise, elles causaient à bâtons rompus.

Monique dit soudain :

— Remarques-tu, en vieillissant, comme les gens à qui l’on dit « tu » deviennent précieux ? Depuis cinq ans, j’ai changé de milieu, j’ai de nouvelles amies. Je les trouve agréables, je les aime bien, mais ce ne sera jamais la même chose. On se lie plus difficilement, plus superficiellement à notre âge. Tandis qu’entre nous, c’est le grand charme, la sincérité, la confiance, et cette conviction que vivrions-nous cent ans, nous nous retrouverions toujours avec la même joie. J’espère que je ne me trompe pas, que je ne m’illusionne pas ?

— Tu ne te trompes pas. Et cependant, j’ai craint qu’une fois mariée, tu ne fusses différente, lointaine…

— Dans un sens, tu avais raison. Moi, tu sais, je préférerais que tu te maries aussi, que ton mari et Maurice s’entendent bien ; et tout serait ensuite pour le mieux dans le meilleur des mondes.

Lucette rougit sans répondre. Heureusement, la bonne sonnait le gong : madame était servie.