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LA PLUS BELLE CHOSE DU MONDE

— Et le plaisir de causer en grignotant des gâteaux chez Kerhulu, après le cours, ajoutait Lucette gourmande.

La mort de leur sentiment pour Poupon Rose leur fournit longtemps un thème sur lequel philosopher. Nicole n’avait jamais dit si elle l’aimait, elle ne disait donc pas pourquoi elle ne l’aimait plus. Monique dénonçait trop tard le ridicule d’un pareil engouement ; Claire se taisait, infidèle déjà, ayant aimé en silence durant l’été, un chanteur célèbre et beau, qu’elle avait entendu une fois, et qu’elle ne reverrait sans doute jamais. Lucette demeurée trois mois à Sainte-Agathe, avait permis à des collégiens de la distraire. Ils lui avaient témoigné leur admiration en passant et repassant devant la maison qu’elle habitait, puis en suscitant l’occasion de se faire présenter. Ensuite, ils l’avaient invitée pour des promenades en voiture. Sa tante ne lui avait permis d’accepter qu’en compagnie d’une amie ou deux. Heureusement, Lucette préférait cela. Ces collégiens flattaient sa vanité, mais elle ne leur découvrait rien d’intéressant ; ils manquaient d’esprit poétique, ils étaient terre à terre, leur conversation lui faisait hausser les épaules. Plus jeune qu’eux, elle se sentait tellement plus vieille, qu’elle ne pouvait les prendre au sérieux.