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ÉVANGÉLINE

Battaient l’onde, en cadence, au refrain des chansons :
Ils allaient vers le nord, la terre des bisons.
Un jeune homme pensif, à la brune prunelle,
Était au gouvernail et guidait la nacelle.
Son poignet musculeux annonçait la vigueur,
Mais son œil était plein d’une morne langueur.
Son âme était bercée au vent de la trisse…
Ce jeune homme c’était Gabriel Lajeunesse !
Sans plaisir, sans espoir, redoutant l’avenir,
Et toujours poursuivi par l’affreux souvenir
Des maux qui l’accablaient depuis quelques années.
Il fuyait tous les lieux pour fuir ses destinées :
Il allait demander l’oubli de ses regrets
Et l’oubli de lui-même aux lointaines forêts.


Creusant un sillon d’or dans l’élément docile,
Le vagabond esquif s’avance jusqu’à l’île