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Page:Marcel Proust - Chroniques, éd. 1936.djvu/115

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VACANCES DE PÂQUES

Les romanciers sont des sots, qui comptent par jours et par années. Les jours sont peut-être égaux pour une horloge, mais pas pour un homme. Il y a des jours montueux et malaisés qu’on met un temps infini à gravir et des jours en pente qui se laissent descendre à fond de train, en chantant. Pour parcourir les jours, les natures un peu nerveuses surtout disposent, comme les voitures automobiles, de « vitesses » différentes.

Puis il y a des jours dépareillés, interpolés, venus d’une autre saison, d’un autre climat. On est à Paris, c’est l’hiver, et pourtant, tandis qu’on dort encore à moitié, on sent que commence un matin printanier et sicilien. Au bruit que fait le premier roulement du tramway, nous entendons qu’il n’est pas morfondu dans la pluie, mais en partance pour l’azur ; mille thèmes populaires finement écrits pour des instruments différents, depuis la corne du raccommodeur de fontaines jusqu’au flageolet du chevrier, orchestrant