Page:Marcel Proust - Chroniques, éd. 1936.djvu/71

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
69
LES SALONS. LA VIE DE PARIS

la comtesse de Guerne habite avec son mari le comte de Guerne, une gracieuse demeure de l’avenue Bosquet — c’est là qu’on entendit pour la première fois les chœurs d’Esther, ce que M. Reynaldo Hahn a peut-être écrit jusqu’ici de plus beau, où toutes les grâces du récit biblique et de la tragédie racinienne se sont transposées et comme exaltées, — demeure ennoblie de tous les témoignages d’admiration que les compositeurs ont donnés à l’artiste, depuis Gounod, qui lui dédiait ses mélodies, jusqu’à Hébert qui a fait son portrait ; soutenue par de légères colonnes de Corinthe, résonnant tantôt au son de la lyre et tantôt de la harpe, et d’une voix aussi qui charme comme l’une et qui émeut comme l’autre, cette demeure heureuse ressemble à la fois à la maison du sage et au temple des muses.

Écho.
Le Figaro, 7 mai 1905.