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Page:Marie Louise Gagneur Les Forcats du mariage 1869.djvu/169

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les forçats du mariage

— Assez patiemment, comme vous le voyez.

— Ne vous offusquez pas des boutades de ma femme, reprit le bon Étienne. Elle est assez jolie pour avoir le droit d’être capricieuse ! Parfois elle simule l’insensibilité, la dureté même ; mais au fond elle est affectueuse et bonne.

La musique commençait.

Robert se pencha vers Juliette, et lui effleurant les cheveux de son haleine :

— Que vous êtes belle ce soir ! murmura-t-il, voyez comme on vous admire.

La narine mobile de Juliette se souleva, sa paupière s’alanguit. En s’appuyant dans son fauteuil, son épaule rencontra la main de Robert. Elle frissonna.

— As-tu froid ? demanda Étienne.

Elle fit un signe négatif.

On jouait Otello. Dans la disposition d’esprit où se trouvait Juliette, cette musique lui ébranlait les nerfs. À la fin de l’acte, Robert vit ses yeux mouillés.

Étienne venait de reconnaître dans la salle un de ses anciens camarades de marine. Il sortit pour aller lui serrer la main.

Juliette et M. de Luz restèrent seuls.

— Comment, la musique vous impressionne jusqu’aux larmes ? interrogea Robert.

— Quelquefois, répondit Juliette en levant sur lui un regard voilé.