Aller au contenu

Page:Marie Louise Gagneur Les Forcats du mariage 1869.djvu/252

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
246
les forçats du mariage

votre amant de ma naïveté, de ma crédulité ! Et cette lettre que vous avez reçue hier matin, elle n’était pas de Mme de Brignon, elle était de Robert. Donnez-la-moi, il me la faut, je la veux.

— Vous ne l’aurez pas, repartit Juliette avec une obstination pleine de défi. J’entends que vous respectiez le secret de mes lettres. Voilà pourquoi je vous l’ai refusée hier.

— Vous l’avez détruite, vous aviez peur, n’est-ce pas ?

— Je l’ai dans ma poche, répliqua-t-elle avec une tranquillité ironique.

Ivre de colère, de jalousie, Étienne se leva soudain, s’avança vers sa femme, la saisit par les épaules et la terrassa.

Il chercha dans la poche de Juliette. La lettre n’y était pas. Elle avait seulement voulu le braver.

— Rien ! Je ne saurai rien, disait-il en se tordant les mains.

La situation était grave, décisive. Juliette le comprit : il fallait à tout jamais détruire les doutes de son mari ; le repos de sa vie entière dépendait de la présence d’esprit qu’elle saurait déployer. Sa résistance était donc calculée : elle voulait, en affectant une dignité blessée, le forcer à rétracter ses soupçons, à demander pardon de ses violences.

— Eh bien ! dit-elle, feignant de céder par grandeur d’âme, quoique vous m’ayez cruellement offensée, je vous pardonne ; car vous me semblez réellement