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Page:Marie Louise Gagneur Les Forcats du mariage 1869.djvu/256

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les forçats du mariage

Elle pleurait aussi, et ses larmes chaudes mouillaient les mains d’Étienne.

En la voyant, cette femme si fière, si hautaine, dans une attitude humiliée, implorante, Étienne fut entraîné, attendri. Il oublia tout soupçon, et, dans un transport d’amour, de remords, par un reste de jalousie peut-être, il la releva et l’embrassa avec emportement.

Tandis que Juliette achevait sa toilette de nuit, Étienne la regardait, plongé dans une sorte de somnolence extatique. Il contemplait la courbe harmonieuse des épaules et le mouvement plein de grâce avec lequel, les deux bras élevés, elle tordait ses cheveux sur sa nuque.

La glace lui renvoyait son charmant visage.

Tous deux se taisaient.

Juliette, qui tournait le dos à son mari, ne se croyait point observée.

À quoi songeait-elle ?

Étienne, lui, ne songeait à rien. Encore brisé de la douleur passée, accablé maintenant par le bonheur d’avoir recouvré le calme, un calme qu’il n’espérait plus, il laissait errer sa pensée où la portaient ses regards, et ses regards ne se détachaient point de Juliette.

Tout à coup il la vit sourire. Sa pensée se fixa. Pourquoi souriait-elle ? Pourquoi son regard, tout à l’heure attendri, était-il devenu sec et moqueur ?

Avec cette netteté de perception qui, en certains