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les forçats du mariage

fatalités. L’indissolubilité du mariage les rend irrémédiables. On accorde, il est vrai, la séparation à une femme qui a été battue par son mari ; mais il est des souffrances intimes bien autrement atroces. Et puis la séparation, ce n’est pas la liberté. Si une femme tient à la considération du monde, il faudra qu’elle refoule à jamais les aspirations les plus légitimes de son cœur. On sera pour elle d’autant plus sévère qu’elle est moins protégée, que sa situation est plus fausse, plus malheureuse. Telle est la justice de l’opinion.

— Mais, monsieur, je ne songe pas à me séparer de mon mari, se récria Marcelle avec vivacité.

— Pardon, madame, si votre ton amical m’a laissé prendre une liberté…

— C’est à moi plutôt, se hâta d’ajouter Marcelle, à m’excuser si je viens vous ennuyer ainsi de mes chagrins. Mais j’étais tout à l’heure si malheureuse, si… Encore une fois, pardonnez-moi de pareilles confidences ; elles sont au moins intempestives au milieu de vos soucis de départ.

— Votre douce affection me fait tant de bien, madame, et j’ai si grand besoin, moi aussi, d’être soutenu et consolé.

— Ah ! oui, je sais, je devine du moins.

Elle lui tendit la main.

Étienne, un peu troublé, la prit avec embarras.

Pendant un instant, émus tous deux, ils n’osaient se regarder ni parler.