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Page:Marie Louise Gagneur Les Forcats du mariage 1869.djvu/296

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les forçats du mariage

— Votre mari peut-il vous donner un enfant qui ne vous appartienne pas ?

Marcelle entrevit l’horrible situation d’Étienne. Elle couvrit son visage de ses mains.

— Ah ! c’est affreux ! c’est affreux, dit-elle.

Elle resta ployée devant lui.

— Eh bien ! à cause de vous, reprit-il, de vous seule, je ne leur ferai aucun mal, je vous le jure. Mais laissez-moi passer, laissez-moi.

Il la releva doucement, l’entraîna à l’écart, lui serra la main avec toute son âme, et sortit.

— 7, rue Servandoni ! cria-t-il au cocher d’une voiture de place, dans laquelle il se jeta.

Et machinalement, pendant le trajet, il répétait : 7, rue Servandoni. Ces trois mots revenaient sans cesse sur ses lèvres. Ces trois mots, écrits en lettres de feu, dansaient devant ses yeux, martelaient son cerveau. Il appuyait contre la glace de la voiture son front brûlant ; il respirait avec peine : une violente contraction de l’organisme empêchait les poumons de se dilater. Sa bouche était sèche, froide, comme si toute la vie se fût concentrée au cœur.

— Peut-on souffrir ainsi pour une pareille femme ? se disait-il.