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les forçats du mariage

antique, se livrait, vis-à-vis de son maître, aux ironies les moins respectueuses.

— Que les singes sont des gens heureux ! soupira Robert. Au moins, ils n’ont pas inventé une civilisation où les jouissances sont mesurées, non selon l’ampleur des capacités, mais selon le volume de métal qu’on a en poche.

— Et surtout, ajouta Pierre, ils n’ont pas inventé le mariage.

— Oui, une belle trouvaille, reprit Robert. Ah ! mon cher, tu as raison, résiste, résiste.

— Que t’arrive-t-il donc à ton tour ?

— Il m’arrive que je suis sur le point de me démarier, autant du moins que faire se pourra.

— Que dis-tu ?

— Avant de m’engager dans ces liens odieux, j’étais à peu près honnête homme. Maintenant, je suis forcé de me considérer comme un chenapan. D’abord, j’ai rendu ma femme très-malheureuse ; mais c’était prévu. En outre, j’ai gaspillé sa dot.

— Comment, les six millions ?

— J’avais des dettes, que j’ai payées ; puis j’ai pris au bout. Tu sais que rien au monde ne m’est répulsif comme une règle d’arithmétique. Quand j’ai de l’argent, je le jette par les fenêtres jusqu’à ce qu’il ne m’en reste plus. Je n’ai pas d’autre manière d’équilibrer mon budget. J’ai vendu tout ce qu’il m’était possible de vendre. Il ne nous reste plus que l’hôtel de la rue de Berry, et 500,000 francs