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Page:Marie Louise Gagneur Les Forcats du mariage 1869.djvu/392

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les forçats du mariage

malheur, la misère avaient détruit tout vestige de son ancienne et merveilleuse beauté. Que de tourments accusaient les rides prématurées de son front ! Que d’amertume dans les plis de ses lèvres autrefois si gracieuses !

— Qu’a donc Lucette ? demanda Étienne quand il se trouva seul avec Marcelle. Il me semble qu’elle a les yeux rouges, et elle paraît plus triste encore que de coutume.

— Son mari lui a écrit de nouveau ce matin. Toujours cet odieux chantage. Il lui enlèvera son fils, si elle ne lui envoie pas d’argent. Sans doute, il en a perdu le droit ; mais Lucette lui fait passer tout ce qu’elle gagne de peur d’un mauvais coup.

— Pauvre femme ! se trouver liée pour la vie à un être pareil, un forçat !

— C’est affreux ! soupira Marcelle. La terreur de Lucette, c’est qu’il ne périsse un jour sur l’échafaud.

— La loi, reprit Étienne, ne devrait-elle pas du moins prévoir des cas semblables, et rompre des liens qui rivent l’existence d’un être honnête à celle d’un criminel ? Ces demi-séparations ne sont-elles pas plus immorales, plus douloureuses, plus funestes même à l’ordre social que le divorce ? Car la séparation désunit sans délivrer ; elle condamne à une sorte de suicide moral des cœurs faits pour aimer. Pourquoi pas le divorce ? Les enfants, dit-