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Page:Marie Louise Gagneur Les Forcats du mariage 1869.djvu/395

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les forçats du mariage

plus à redouter les menaces de ce bandit, et sa vie ne serait pas à jamais flétrie par ce lien qui la déshonore, elle et son enfant.

— Ah ! sans doute, vous avez raison, mon ami ; mais les lois, hélas ! sont plus fortes que nous, et nos souffrances ignorées ne les feront pas changer. Je vous en prie, ouvrez cette fenêtre. Ne trouvez-vous pas qu’il fait un peu chaud ?

Étienne se leva pour ouvrir la croisée.

Marcelle était oppressée : elle éprouvait une sorte de malaise. L’animation nerveuse avec laquelle Étienne venait de parler, lui faisait vaguement appréhender un danger. Elle essaya de changer de conversation.

— Vous ai-je dit que j’attendais ma mère demain ? J’ai reçu un mot ce matin qui m’annonce son arrivée, si toutefois mon père consent à la laisser partir, et à lui donner l’argent nécessaire pour son voyage ; car, depuis les dernières catastrophes qui l’ont ruiné, il est plus irritable, plus tyrannique que jamais. Croiriez-vous qu’il accuse cette pauvre femme de tous ses désastres ? C’est elle qui l’a ruiné, dit-il, par son incurie, son insouciance. Vous savez si elle avait le droit seulement de donner un conseil, de faire la moindre dépense. Souvent même il lui refusait l’argent le plus indispensable, sous prétexte qu’elle eût été incapable de le gagner et de le dépenser sagement. Je n’ose me plaindre, moi, quand je pense au malheur de ma mère. Elle a tout supporté par