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Page:Marie Louise Gagneur Les Forcats du mariage 1869.djvu/418

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les forçats du mariage

— Voilà un retour de tendresse conjugale qui ne manque pas d’opportunité, dit Robert en lançant une bouffée de fumée.

— Ah ! c’est qu’il y a des instants où, révoltée de votre froideur, de votre scepticisme…

— De mon scepticisme ? Et vous, à quoi croyez-vous donc ?

— Moi ! sceptique ! Mais je crois à tout ; à Dieu, à l’enfer, et surtout à l’amour. Aimer, être aimée vraiment, je n’ai plus que ce rêve, le seul de ma vie. Je ne l’ai été qu’une fois, par Étienne, et je ne l’ai pas compris. Aussi, par moments, je songe encore à aller me jeter à ses pieds, le supplier de me rendre son amour, de me rendre ma fille. Ces liens, ces amours purs que j’ai méconnus, me réhabiliteront, si je puis l’être.

— Il n’y a qu’une difficulté, ma pauvre Juliette, c’est qu’il est assez probable que votre mari vous recevrait fort mal. Vous savez qu’il est l’amant de Marcelle.

— Ah ! je le sais bien, et c’est pourquoi j’hésite, j’ai peur.

— Elle le savait, fit en riant Robert. Voilà donc pourquoi aujourd’hui vous aimez votre mari : c’est uniquement parce qu’il en aime une autre, et que ce bonheur vous gêne. Croyez-moi, laissez ce brave homme en paix. Laissez-lui surtout le soin d’élever votre fille. Et si c’est Marcelle qui doit en être chargée, elle s’en acquittera mieux que vous.