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Page:Maupassant - Au soleil - Ollendorff, 1902.djvu/310

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le creusot

d’une table, elle verse le flot flamboyant d’acier qu’elle porte en ses flancs dans une série de récipients de fonte déposés en rond autour delle.

Elle semble se déplacer d’une façon naturelle, toute simple, comme si une âme l’animait. Car il suffit, pour remuer ces engins fantastiques, pour leur faire accomplir leur œuvre, les faire aller, venir, tomber, se redresser, tourner, pivoter, il suffit de toucher à des leviers gros comme des cannes, d’appuyer sur des boutons pareils à ceux des sonnettes électriques. Une force, un génie étrange semble planer, qui gouverne les gestes pesants et faciles de ces surprenants appareils.

Nous sortons, le visage rôti, les yeux sanglants.

Voici deux tours de briques, en plein air, trop hautes pour tenir sous un toit. Une chaleur insoutenable s’en dégage. Un homme, armé d’un levier de fer, les frappe au pied, fait tomber une sorte d’enduit, creuse plus profondément. Et bientôt apparaît une lueur, un point clair. Deux coups encore et un ruisseau, un torrent de feu s’élance, suit des canaux creusés dans la terre, va, vient, coule toujours. C’est la fonte, la fonte brute en fusion. On suffoque devant ce fleuve effrayant, on fuit, on entre dans les hauts bâtiments où