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Page:Maupassant - Clair de lune, 1905.djvu/206

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apparition

tement d’une maladie de cœur, tuée par l’amour lui-même, sans doute.

« Il avait quitté son château le jour même de l’enterrement, et il était venu habiter son hôtel de Rouen. Il vivait là, solitaire et désespéré, rongé par la douleur, si misérable qu’il ne pensait qu’au suicide.

« — Puisque je te retrouve ainsi, me dit-il, je te demanderai de me rendre un grand service, c’est d’aller chercher chez moi dans le secrétaire de ma chambre, de notre chambre, quelques papiers dont j’ai un urgent besoin. Je ne puis charger de ce soin un subalterne ou un homme d’affaires, car il me faut une impénétrable discrétion et un silence absolu. Quant à moi, pour rien au monde je ne rentrerai dans cette maison.

« Je te donnerai la clef de cette chambre que j’ai fermée moi-même en partant, et la clef de mon secrétaire. Tu remettras en outre un mot de moi à mon jardinier qui t’ouvrira le château.

« Mais viens déjeuner avec moi demain, et nous causerons de cela. »

« Je lui promis de lui rendre ce léger service. Ce n’était d’ailleurs qu’une promenade pour moi,