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le testament

» Je lui pardonne, mais je ne lui dois rien.

» Mes fils aînés ne m’ont point aimée, ne m’ont point gâtée, m’ont à peine traitée comme une mère.

» J’ai été pour eux, durant ma vie, ce que je devais être ; je ne leur dois plus rien après ma mort. Les liens du sang n’existent pas sans l’affection constante, sacrée, de chaque jour. Un fils ingrat est moins qu’un étranger ; c’est un coupable, car il n’a pas le droit d’être indifférent pour sa mère.

» J’ai toujours tremblé devant les hommes, devant leurs lois iniques, leurs coutumes inhumaines, leurs préjugés infâmes. Devant Dieu, je ne crains plus. Morte, je rejette de moi la honteuse hypocrisie ; j’ose dire ma pensée, avouer et signer le secret de mon cœur.

» Donc, je laisse en dépôt toute la partie de ma fortune dont la loi me permet de disposer, à mon amant bien-aimé Pierre-Germer-Simon de Bourneval, pour revenir ensuite à notre cher fils René.

(Cette volonté est formulée en outre, d’une façon plus précise, dans un acte notarié.)

» Et, devant le Juge suprême qui m’entend, je