Page:Maupassant - Conte de la bécasse, 1906.djvu/244

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
234
un coq chanta

à travers la robe de nuit. Elle ne disait rien, en fonçant ses doigts fins, d’une manière caressante, dans les cheveux du baron.

Et soudain, se dégageant comme si elle eût pris une grande résolution, elle murmura de son air hardi, mais à voix basse : « Je vais revenir. Attendez-moi. » Et son doigt, tendu dans l’ombre montrait au fond de la chambre la tache vague et blanche du lit.

Alors, à tâtons, éperdu, les mains tremblantes, il se dévêtit bien vite et s’enfonça dans les draps frais. Il s’étendit délicieusement, oubliant presque son amie, tant il avait plaisir à cette caresse du linge sur son corps las de mouvement.

Elle ne revenait point, pourtant, s’amusant sans doute à le faire languir. Il fermait les yeux dans un bien-être exquis ; et il rêvait doucement dans l’attente délicieuse de la chose tant désirée. Mais peu à peu ses membres s’engourdirent, sa pensée s’assoupit, devint incertaine, flottante. La puissante fatigue enfin le terrassa ; il s’endormit.

Il dormit du lourd sommeil, de l’invincible sommeil des chasseurs exténués. Il dormit jusqu’à l’aurore.