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Page:Maupassant - Conte de la bécasse, 1906.djvu/35

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ce cochon de morin

Elle s’arrêta pour me considérer du haut en bas, puis elle dit tranquillement : « Oh, vous, ce n’est pas la même chose. »

Je le savais bien, parbleu, que ce n’était pas la même chose, puisqu’on m’appelait dans toute la province « le beau Labarbe ». J’avais trente ans, alors, mais je demandai : « Pourquoi ça ? »

Elle haussa les épaules, et répondit : « Tiens ! parce que vous n’êtes pas aussi bête que lui. » Puis elle ajouta, en me regardant en dessous :

« Ni aussi laid. »

Avant qu’elle eût pu faire un mouvement pour m’éviter, je lui avais planté un bon baiser sur la joue. Elle sauta de côté, mais trop tard. Puis elle dit : « Eh bien ! vous n’êtes pas gêné non plus, vous. Mais ne recommencez pas ce jeu-là. »

Je pris un air humble et je dis à mi-voix :

« Oh ! Mademoiselle, quant à moi, si j’ai un désir au cœur, c’est de passer devant un tribunal pour la même cause que Morin. »

Elle demanda à son tour : « Pourquoi ça ? »

Je la regardai au fond des yeux sérieusement. « Parce que vous êtes une des plus belles créatures qui soient ; parce que ce serait pour moi un