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ce cochon de morin

Mais j’avais trouvé ; je m’écriai : « Mademoiselle, voici un an que je vous aime ! »

Elle fut vraiment surprise et releva les yeux. Je repris : « Oui, Mademoiselle, écoutez-moi. Je ne connais pas Morin et je me moque bien de lui. Peu m’importe qu’il aille en prison et devant les tribunaux. Je vous ai vue ici, l’an passé ; vous étiez là-bas devant la grille. J’ai reçu une secousse en vous apercevant et votre image ne m’a plus quitté. Croyez-moi ou ne me croyez pas, peu m’importe. Je vous ai trouvée adorable ; votre souvenir me possédait ; j’ai voulu vous revoir ; j’ai saisi le prétexte de cette bête de Morin ; et me voici. Les circonstances m’ont fait passer les bornes ; pardonnez-moi, je vous en supplie, pardonnez-moi. »

Elle guettait la vérité dans mon regard, prête à sourire de nouveau ; et elle murmura : « Blagueur ! »

Je levai la main, et, d’un ton sincère (je crois même que j’étais sincère) : « Je vous jure que je ne mens pas. »

Elle dit simplement : « Allons donc ! »

Nous étions seuls, tout seuls, Rivet et l’oncle