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fort comme la mort

Elle saisit le dernier mot.

— Oui, j’ai maigri. J’étais un peu trop forte à un moment, et je me suis peut-être affaiblie en me mettant à la diète.

— Sans aucun doute. Il n’y a pas de mal à rester maigre quand on l’a toujours été, mais quand on maigrit par principe, c’est toujours aux dépens de quelque chose. Cela, heureusement, se répare vite. Adieu Madame.

Elle se sentait mieux déjà, plus alerte ; et elle voulut qu’on allât chercher pour le déjeuner la bière qu’il avait indiquée, à la maison de vente principale, afin de l’avoir plus fraîche.

Elle sortait de table quand Bertin fut introduit.

— C’est encore moi, dit-il, toujours moi. Je viens vous interroger. Faites-vous quelque chose tantôt ?

— Non, rien ; pourquoi ?

— Et Annette ?

— Rien non plus.

— Alors, pouvez-vous venir chez moi vers quatre heures ?

— Oui ; mais à quel propos ?

— J’esquisse ma figure de la Rêverie, dont je vous ai parlé en vous demandant si votre fille pourrait me donner quelques instants de pose. Cela me rendrait un grand service si je l’avais seulement une heure aujourd’hui. Voulez-vous ?

La comtesse hésitait, ennuyée sans savoir de quoi. Elle répondit cependant :

— C’est entendu, mon ami, nous serons chez vous à quatre heures.

— Merci. Vous êtes la complaisance même.

Et il s’en alla préparer sa toile et étudier son sujet pour ne point trop fatiguer le modèle.