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Page:Maupassant - Fort comme la mort.djvu/341

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— Mon mari vous accompagnera et les ramènera de gré ou de force.

— Vous ne pouvez rester seule ici, vous, Madame.

— Moi !… fit-elle avec une sorte de cri, de défi, de protestation indignée contre toute résistance à sa volonté. Puis elle exposa, avec cette autorité de parole à laquelle on ne réplique point, les nécessités de la situation. Il fallait qu’on eût, avant une heure, l’interne et la garde, afin de prévenir tous les accidents. Pour les avoir, il fallait que quelqu’un les prît au lit et les amenât. Son mari seul pouvait faire cela. Pendant ce temps, elle resterait auprès du malade, elle, dont c’était le devoir et le droit. Elle remplissait simplement son rôle d’amie, son rôle de femme. D’ailleurs, elle le voulait ainsi et personne ne l’en pourrait dissuader.

Son raisonnement était sensé. Il en fallait bien convenir, et on se décida à le suivre.

Elle s’était levée, tout entière à cette pensée de leur départ, ayant hâte de les sentir loin et de rester seule. Maintenant, afin de ne point commettre de maladresse pendant leur absence, elle écoutait, en cherchant à bien comprendre, à tout retenir, à ne rien oublier, les recommandations du médecin. Le valet de chambre du peintre, debout à côté d’elle, écoutait aussi, et, derrière lui, sa femme, la cuisinière, qui avait aidé pendant les premiers pansements, indiquait par des signes de tête qu’elle avait