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Page:Maupassant - Fort comme la mort.djvu/9

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— Vous savez, dit-elle gravement, que si vous vous remettez à faire des portraits de femme, je fermerai votre atelier. Je sais trop où ça mène, ce travail-là.

— Oh ! dit-il, on ne fait pas deux fois un portrait d’Any.

— Je l’espère bien.

Elle examinait le pastel commencé en femme qui sait les questions d’art. Elle s’éloigna, se rapprocha, fit un abat-jour de sa main, chercha la place d’où l’esquisse était le mieux en lumière, puis elle se déclara satisfaite.

— Il est fort bon. Vous réussissez très bien le pastel.

Il murmura, flatté.

— Vous trouvez ?

— Oui, c’est un art délicat où il faut beaucoup de distinction. Ça n’est pas fait pour les maçons de la peinture.

Depuis douze ans elle accentuait son penchant vers l’art distingué, combattait ses retours vers la simple réalité, et par des considérations d’élégance mondaine, elle le poussait tendrement vers un idéal de grâce un peu maniéré et factice.

Elle demanda :

— Comment est-elle, la princesse ?

Il dut lui donner mille détails de toute sorte, ces détails minutieux où se complaît la curiosité