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Page:Maupassant - Fort comme la mort.djvu/97

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un mépris mêlé de dégoût, la gênaient et l’irritaient, et elle dit soudain :

— Je trouve qu’on ne devrait laisser venir ici que les voitures de maître.

Bertin répondit :

— Eh bien, Mademoiselle, que fait-on de l’égalité, de la liberté et de la fraternité ?

Elle eut une moue qui signifiait « à d’autres » et reprit :

— Il y aurait un bois pour les fiacres, celui de Vincennes, par exemple.

— Tu retardes, petite, et tu ne sais pas encore que nous nageons en pleine démocratie. D’ailleurs, si tu veux voir le bois pur de tout mélange, viens le matin, tu n’y trouveras que la fleur, la fine fleur de la société.

Et il fit un tableau, un de ceux qu’il peignait si bien, du bois matinal avec ses cavaliers et ses amazones, de ce club des plus choisis où tout le monde se connaît par ses noms, petits noms, parentés, titres, qualités et vices, comme si tous vivaient dans le même quartier ou dans la même petite ville.

— Y venez-vous souvent ? dit-elle.

— Très souvent ; c’est vraiment ce qu’il y a de plus charmant à Paris.

— Vous montez à cheval, le matin !

— Mais oui.