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Page:Maupassant - La main gauche, Ollendorff, 1903.djvu/146

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le lapin

Un pli de malice normande rida la grosse bouche de Lecacheur qui répondit :

— Pour l’connaître, non, je l’connais point, vu que j’l’ai pas vu vôler. Si j’l’avais vu, j’y aurais fait manger tout cru, poil et chair, sans un coup d’cidre pour l’faire passer. Pour lors, pour dire qui c’est, je l’dirai point, nonobstant que j’crais qu’c’est çu propre à rien de Polyte.

Alors il expliqua longuement ses histoires avec Polyte, le départ de ce valet, son mauvais regard, des propos rapportés, accumulant des preuves insignifiantes et minutieuses.

Le brigadier, qui avait écouté avec grande attention tout en vidant son verre de vin et en le remplissant ensuite, d’un geste indifférent, se tourna vers son gendarme :

— Faudra voir chez la femme au berqué Severin, dit-il.

Le gendarme sourit et répondit par trois signes de tête.

Alors, Mme Lecacheur se rapprocha, et tout doucement, avec des ruses de paysanne, interrogea à son tour le brigadier. Ce berger Severin, un simple, une sorte de brute, élevé dans un parc à