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Page:Maupassant - Miss Harriet - Ollendorff, 1907.djvu/162

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l’héritage

chant, il l’aperçut la tête contre un arbre, malade. Un soupçon rapide lui coupa les jarrets et il s’abattit sur sa chaise, jetant des regards effarés sur les deux hommes qui semblaient maintenant aussi confus l’un que l’autre. Il les fouillait de son œil anxieux, n’osant plus parler, fou d’angoisse et d’espérance.

Un quart d’heure s’écoula dans un silence profond. Et Cora reparut, un peu pâle, marchant avec peine. Personne ne l’interrogea d’une façon précise ; chacun paraissait deviner un événement heureux, pénible à dire, brûler de le savoir et craindre de l’apprendre. Seul, Cachelin lui demanda : « Ça va mieux ? » Elle répondit : « Oui, merci, ce n’était rien. Mais nous rentrerons de bonne heure, j’ai un peu de migraine. »

Et pour repartir, elle prit le bras de son mari comme pour signifier quelque chose de mystérieux qu’elle n’osait avouer encore.

On se sépara dans la gare Saint-Lazare. Maze, prétextant une affaire dont le souvenir lui revenait, s’en alla après avoir salué et serré les mains.

Dès que Cachelin fut seul avec sa fille et son gendre il demanda : « Qu’est-ce que tu as eu pendant le déjeuner ? »

Mais Cora ne répondit point d’abord ; puis après avoir hésité quelque temps : « Ce n’était rien. Un petit mal de cœur. »