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Page:Maupassant - Pierre et Jean, Ollendorff, 1888.djvu/61

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— Veux-tu que je tire seul avec les avirons de couple ?

— Non, merci, cela passera.

La mère ennuyée disait :

— Voyons, Pierre, à quoi cela rime-t-il de se mettre dans un état pareil, tu n’es pourtant pas un enfant.

Il haussait les épaules et recommençait à ramer.

Mme Rosémilly semblait ne pas voir, ne pas comprendre, ne pas entendre. Sa petite tête blonde, à chaque mouvement du bateau, faisait en arrière un mouvement brusque et joli qui soulevait sur les tempes ses fins cheveux.

Mais le père Roland cria : « Tenez, voici le Prince-Albert qui nous rattrape. » Et tout le monde regarda. Long, bas, avec ses deux cheminées inclinées en arrière et ses deux tambours jaunes, ronds comme des joues, le bateau de Southampton arrivait à toute vapeur, chargé de passagers et d’ombrelles ouvertes. Ses roues rapides, bruyantes, battant l’eau qui retombait en écume, lui donnaient un air