Page:Maupassant - Yvette.djvu/181

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chissante d’un éventail qui aurait été fait de toutes les feuilles des bois et de toutes les ombres de la nuit, de la brume des rivières, et de toutes les fleurs aussi, car les roses jetées d’en bas dans sa chambre et sur son lit, et les roses grimpées au balcon, mêlaient leur senteur languissante à la saveur saine de la brise nocturne.

Elle buvait cet air si bon, les yeux fermés, le cœur reposé dans l’ivresse encore persistante de l’opium, elle n’avait plus du tout le désir de mourir, mais une envie forte, impérieuse, de vivre, d’être heureuse, n’importe comment, d’être aimée, oui, aimée.

Servigny répéta :

— Mam’zelle Yvette, écoutez-moi.

Et elle se décida à ouvrir les yeux. Il reprit, la voyant ranimée :

— Voyons, voyons, qu’est-ce que c’est que des folies pareilles ?

Elle murmura :

— Mon pauvre Muscade, j’avais tant de chagrin.

Il lui serrait la main paternellement :

— C’est ça qui vous avançait à grand-chose, ah oui ! Voyons, vous allez me promettre de ne pas recommencer ?