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468 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

psychologique, l'esprit de finesse qu'en cette matière lui ont transmis ses moralistes et qui nous met immédiatement en état de défiance et de sourire devant certaines insistances de théorie ou certaine lourdeur d'exposition, a vu surtout dans les doctri- nes psychologiques de ses voisins une matière à critiquer et à dépasser. L'associationnisme anglais a servi longtemps d'adver- saire traditionnel à une psychologie non moins traditionnelle, comme l'Anglais lui-même à nos marins, et tout bachelier de philosophie se souvient de Fcchner comme tout certifié d'études primaires se rappelle le vase de Soissons. C'est que Fechner était le type du psychologue qu'on « réfutait » victorieusement, comme Kant était celui du philosophe qu'on « dépassait n majestueu- sement (les Kantophobes de notre littérature politique ont fait là-dessus des confusions bien comiques) et il occupait à ce titre dans le cours de psychologie une place rituelle. Ne nous moquons pas d'ailleurs : cela a amené la psychologie française à prendre davantage conscience de son élément moteur, de ce que ses traditions contenaient de fécond, de préciser la qualité par cette critique de la quantité, l'esprit de finesse par cette cri- tique de l'esprit de géométrie. Que dans tout cela le psycho- logue allemand fût un peu dénaturé, et qu'on réfutât moins Fechner que ce que Fechner aurait dû dire pour être bien réfuté, c'est ce qui n'étonnera personne de ceux qui savent que la discussion de là psychologie relève, comme toutes les autres, de la psychologie de la discussion.

Plus précisément nous dirons que la psychologie, comme toutes les sciences qui portent sur les phénomènes de la vie, comporte des écoles, procède par écoles ; que, dans ces écoles formées autour de la personne d'un maître presque autant qu'autour de l'œuvre imprimée qui fait sa doctrine partout présente dans l'espace, les considérations de langue, de nation, de religion, de clientèle, d'éloquence, de savoir-faire jouent un rôle important ; que, sciences de la vie, elles baignent par ail- leurs de toutes parts dans les conditions et dans les nécessités, souvent humiliantes, de la vie. Un mathématicien n'a pas besoin d'élèves : ses élèves ce sont les quelques douzaines ou centaines de têtes mathématiques vivant ensemble sur la pla- nète, capables de le comprendre, et auxquelles quelques pages dans une revue spéciale donnent toute la connaissance utile de

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