Page:Picard - Sabbat, 1923.djvu/148

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
142
SABBAT

lierre funèbre, partout, un bouquet de menthe médicinale entre les pavés humides, une fontaine tarie ou qui coulait, quelquefois, comme pleure une vieille qui se souvient…

Je vivais dans l’ombre, entouré de mes dossiers, poursuivi, parfois, par le regard d’un condamné à mort, surveillé par les cartons verts. C’est étonnant combien la couleur verte s’installe chez vous dès que vous êtes désabusé et un peu chauve ! La mousse envahissait l’appui de mes balcons, et mes chandeliers Empire s’obstinaient à distiller du vert-de-gris. Je te rappelle ces immenses rideaux de reps qui semblaient avoir dix mètres de longueur. Ah ! les huit rideaux verts de mon salon vert ! Il fallait qu’il comptât quatre fenêtres, celui-là ! Une façon d’y voir un peu moins clair puisque la cour n’était que tristesse, humidité, végétation et souffle du nord…

Un chat faisait, entre Hortense et moi, un lien brûlant et silencieux, et quand cette bête noire qui ne cessait pas de fabriquer du phosphore dans sa prunelle élargie, se glissait sur les genoux d’Hortense, elle disait : « Jésus ! Pitié ! Seigneur ! » et elle se signait, car elle était pieuse comme une damnée.

Un soir — et avec quelle voix de congréganiste chlorotique et pleine de stupeur ! — elle me chanta une complainte que lui avait