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SABBAT

en ont augmenté l’horreur en la flétrissant… Ouvre ces missels sur lesquels a pesé l’ombre des moines pourris de patience et d’orgueil. Je suis effrayée par l’encre épaisse et pâlie qui les couvre plus que par toute l’écriture stellaire.

Regarde ces vitraux bleus comme un printemps de l’âme, rouges comme une blessure du cœur, violets comme une salutation de l’esprit.

Adore l’or qu’allume un brasier de supplications blanches.

Écoute : l’heure sonne dans la tour de la basilique… Et pense à l’éternité à cause de cette voix d’argent qui se tait si vite.

Ah ! délectation religieuse de mon esprit damné !

…Je sais qu’une pâmoison pire que celle qui nous vient des musiques charnelles, dans les lits tout sonores d’enfer, sera la mienne quand je verrai s’accomplir, au-dessus des lutrins massifs, dans les verrières haïssables de suavité céleste, la Nativité, l’Ascension, la visite d’Anne à Élisabeth.

Silence.

Satan n’habite que la sainteté des choses. Et c’est justice que notre avidité mentale qui est si formidable ne s’apaise un peu qu’en dévorant le cœur des Séraphins.

T’ai-je montré ma sainte Thérèse ? Comme elle me ressemble, parfois, cette maudite qui n’est que pénitence, voiles noirs, sombres regards, soupirs intérieurs, poitrine de braise,