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Page:Picard - Sabbat, 1923.djvu/294

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SABBAT

cache-toi vite ! — à vouloir être possédés par ma divinité inconcevable.

La caresse. — Si douce…

La tourterelle. — Si tendre…

Le léopard. — Si tendre ? Elle est folle. Satan est, chez nous, cette belle bête rusée, fleurie de sang, jaspée de noir.

Le vautour. — Il ne peut être qu’un sombre oiseau, rapace et dégoûté.

Le loup. — Que ce chien que je suis, affamé et maigre.

Le lion. — Que ce roi que je représente, superbe et seul.

L’antilope. — Que cette victime que j’aime figurer, cette victime fuyante, tricheuse, plaintive, aux yeux d’esclave chérie.

Le serpent. — Laissez donc tranquille celui qui ne fréquente que moi. Nous avons même venin et même sagesse, même perfidie et même grâce, même silence et même persuasion, même regard luisant et même topaze royale, là, sur le front, et même destinée maudite, nous dont la mission ravissante est de nous dérober dès que nous avons menti.

Ève. — Satan ? Je l’ai conçu. Il s’appelait Caïn.

Abel. — Je l’ai adoré. Il me tua.

Noé. — Satan ? Je l’ai vu s’échapper, sous la forme d’une colombe, de l’Arche captive.

Moïse. — Et, moi, je l’ai senti s’élever, à mon front, en deux cornes de flamme quand je descendais du Sinaï, tout chancelant sous