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Page:Picard - Sabbat, 1923.djvu/61

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LA SORCIÈRE ET LA VIE

Je suis sans péché, mais coupable. De quoi ? De tout. On me suspecte, on m’accuse trop et toujours pour que je ne sois pas infiniment coupable. Ceux qui m’aiment le savent et me le reprochent avec une âpreté affreuse. Ils ne me pardonnent rien, ni le ricanement de l’impie, ni la jaunisse du jaloux. La menteuse, la dissolue, la méchante, la criminelle trouvent grâce. Pas moi. Jamais, jamais on n’a cessé de me condamner et jusque et surtout dans le foyer ardent de mes vertus terribles.

Je suis sans péché, mais coupable. De quoi ? De tout… Et de l’horreur des abattoirs et du venin qui se forme dans les glandes de la vipère. Je sais que le vitriol qu’on a lancé sur un visage pauvre et sale a eu mon sourire quand on l’enferma dans le flacon désespéré. La mère qui égorge son nouveau-né fronce, comme moi, les sourcils quand je médite. Le loup qui poursuit le loup aux fins du carnage