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Page:Rachilde - La Marquise de Sade, 1887.djvu/118

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vision sanglante du bœuf qu’elle avait vu tuer un jour, au fond d’une espèce de cave, d’un coup, pour en tirer quelques gouttes de sang. Une révolution s’opéra en elle ; on avait tué sa mère comme cela, du même coup, pour avoir ce petit morceau de chair… tout ce qui restait d’elle, de sa tête, de ses cheveux, de sa poitrine, de ses jambes, de sa voix… Mary repoussa avec violence son oncle, le docteur, elle s’élança dans la chambre mortuaire les poings en avant, l’œil hors de l’orbite.

— Maman… on a tué maman ! hurla-t-elle, tandis que chacun se bouchait les oreilles, saisi de frayeur.

Et la petite fille, tourbillonnant sur elle-même, vint s’abattre, sans connaissance, devant l’écusson du lit antique où la devise éclatait, toute rouge, à la lueur des cierges : Aimer, c’est souffrir !