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Page:Rachilde - La Marquise de Sade, 1887.djvu/245

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laquelle, serait plus agréable que leur perpétuel mutisme. Elle avait, de son côté, des choses à confier à son oncle. Tulotte la combla de recommandations du haut de la rampe.

— Souviens-toi de lui demander du bordeaux pour tous nos repas, je t’en prie, criait-elle ; moi, je me délabre l’estomac à boire de l’ordinaire…

Mary ne répondait pas, elle courait à la lutte avec une sorte de courage sauvage.

Quand elle se présenta sur le seuil du cabinet, elle demeura tout interdite à cause des choses nouvelles qu’elle aperçut. Ce cabinet, tendu de drap vert myrte, aux rideaux et aux portières en verdures flamandes, exhalait on ne savait quel relent fade, une odeur très désagréable. Le fond de la pièce était occupé par une grande bibliothèque à colonnes torses. Les livres s’entassaient dans un désordre pittoresque, les uns ouverts, les autres posés de champ, majestueux, reliés d’or et de cuir fin. Une petite forge, installée à côté de la bibliothèque, montrait son ouverture comme un trou dont on ne doit pas voir l’issue. Puis, deux fourneaux, d’aspect compliqué, des tas de fioles aux goulots tordus, des instruments de chirurgie, des écrins en velours contenant les plus artistiques bijoux d’acier, luisants et mystérieux. Trois ou quatre consoles de marbre noir portaient encore des objets étranges : un squelette criblé de numéros comme d’une vermine, de longues peaux d’animaux avec leurs nerfs détaillés, des bocaux remplis de bêtes innommables, et, domi-