Page:Rachilde - La Marquise de Sade, 1887.djvu/271

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assise à ses côtés, tout près de lui, lisant le chef-d’œuvre de Longus qu’il lui semblait ouïr pour la première fois, vêtue d’un peignoir de blanche batiste, sans corset, un peu ouvert et ses cheveux sombres se répandant le long de ses hanches, de ses hanches qui, devenues très dures, tendaient l’étoffe. Avant la lecture il s’était amusé comme un collégien malicieux à démonter pièce à pièce sa Vénus, joyau merveilleux et mécaniquement obscène. Aucune idée de dépravation pendant ce travail que le professeur laissait respectable, mais par hasard elle avait ri, montrant ses petites dents de louve tourmentée des sens, elle avait ri, et lui, fort ému, il avait voilé d’une serge les charmes de cire, songeant aux charmes vivants. Une obsédante pensée lui était venue en l’écoutant raconter la touchante idylle païenne, l’histoire chaste la mieux faite pour fouetter les sens des pauvres vieux, et avait pensé qu’il devait avoir eu tort de négliger les joies contenues en ces délicatesses si vite flétries de la femme. Un moment elle s’arrêta, le regardant du coin de son œil étrange ; le livre glissa, il la prit sur ses genoux : alors, c’est là que ses souvenirs s’enveloppaient d’une espèce de folie. Certes, elle irait vierge au bras de l’époux qu’elle se choisirait, mais… Mon Dieu ! lui qui aurait voulu créer une nouvelle spécialité de jeune fille, sachant tout et impeccable par cela même qu’elle posséderait l’explication de tous les dangers !

Le docteur Barbe se leva avec un geste de résignation :