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Page:Rachilde - La Marquise de Sade, 1887.djvu/304

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À cet instant Tulotte entra comme une folle.

— Les malles, devant le perron… ma nièce !

Elle se jeta au cou de la jeune femme.

— Mais, sacrebleu, on prévient les gens ! Moi, j’étais chez la fruitière, là-bas, au coin de la rue. Figure-toi, le vieux sale qui ferme tout depuis votre départ ! Tu as bien raison de revenir. Je crève… il me fera mourir de soif. Et ton mari, où est-il ?

— Je l’ai laissé à Bade. Il me refusait de l’argent pour jouer. Tu me connais, n’est-ce pas ? J’ai pris le train, me voici !

Tulotte éclata de fureur. Oh ! ces hommes ! hurla-t-elle brandissant son chapeau avec une indignation tragique.

M. Barbe, réveillé par les appels formidables de Tulotte, descendit, les jambes molles, tout désorienté ; elle revenait toute seule : un malheur qui se préparait pour lui. Il l’embrassa sur le front, timide comme un écolier.

— Tu auras de l’argent ici, mon chat, bégaya-t-il, tout ce qu’il te faudra… mais tu ne me brutaliseras pas, hein ?… J’ai offert l’hospitalité au petit Richard, il est si tranquille… il… ça ne tire pas à conséquence, il dîne à ma table… au bout, tu sais… il ne parle jamais… Je le renverrai d’ailleurs, dès ce soir… il m’est si dévoué cet enfant, et si respectueux !

Elle fit un signe gracieux d’acquiescement.

— Vous êtes bien libre, mon oncle !

Et elle sortit pour aller se faire préparer un bain