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Page:Rachilde - Monsieur Venus, Brossier, 1889.djvu/123

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monsieur vénus

En sentant qu’elle lui faisait mal, les nerfs de Raoule se détendirent.

— Tu dois t’apercevoir, dit-elle ironiquement, que je n’ai pas, comme toi, des mains de fleuriste et que, de nous deux, le plus homme c’est toujours moi ?

Jacques, sans répondre, la regardait à la dérobée, ayant à chaque coin de ses lèvres un pli amer.

Dans l’inertie qu’on lui imposait, sa beauté féminine ressortait davantage, et de sa faiblesse, devenue peut-être volontaire, émanait une puissance mystérieusement attirante.

— Cruelle !… fit-il très bas.

Raoule saisit un coussin, au hasard, et le mit sous la tête rousse du jeune homme.

— Tu me rends folle ! balbutia-t-elle.

Je voudrais t’avoir à moi seule, et tu parles, tu ris, tu écoutes, tu réponds devant les autres avec l’aplomb d’un être ordinaire ! Ne devines-tu pas que ta beauté, presque surhumaine, déprave l’esprit de tous ceux qui t’approchent ?

Hier, je voulais t’aimer à ma guise’sans t’expliquer mes souffrances ; aujourd’hui, je