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Page:Rachilde - Monsieur Venus, Brossier, 1889.djvu/209

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monsieur vénus

Jacques refusait d’avancer ; ahuri par les flots de clarté magique de ce salon resplendissant, marchant sur les robes étalées, grisé par les senteurs capiteuses que répandaient ces chevelures poudrées de pierreries, l’ancien ouvrier fleuriste se croyait encore en proie au vertige paradisiaque que lui donnaient les fumées du haschich.

— Es-tu nigaud ! mon pauvre petit peintre, disait Martin Durand, très vexé d’avoir à constater ce manque d’audace chez un camarade. Un peu d’aplomb, morbleu ! dévisage les femmes, bouscule les hommes, tiens, imite-moi… Est-ce que deux gars de notre espèce craignent le feu de la rampe ? Ah ! voilà M. de Raittolbe ; nous sommes sauvés.

En réalité, la tête de l’architecte n’était pas plus solide que celle du peintre, mais il avait l’inimitable aplomb de tous les démolisseurs qui savent un peu rebâtir.

Le baron de Raittolbe lui serra la main, évitant de toucher celle de son ami.

— Messieurs, enchanté de vous voir, je me charge de votre présentation…

Et il les entraîna jusqu’à Raoule.