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Page:Ramuz - La beauté sur la terre, 1927.djvu/60

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Et le voilà qui disait, tout en marchant à côté du Savoyard qui poussait son wagonnet :

— Parce que, vous savez, on va bâtir. Oui, on se jette dans la construction. Il me faudrait des briques, il me faudrait du sable. Il faudrait que le patron me fournisse aussi le ciment… Il pourrait m’amener tout ça un de ces jours…

Plus tard il a été chez Perrin, le constructeur de bateaux-charpentier, c’est-à-dire presque un collègue ; et puis surtout son atelier était en face de l’établissement de Milliquet, bonne occasion de boire un verre.

Ce jour-là Rouge est allé à trois reprises chez Milliquet…

— Oui, disait-il, c’était trop petit, c’était véritablement trop petit et puis ça ne tenait plus debout. Alors on s’est fait maçons, Décosterd et moi.

L’eau ne manquait pas, heureusement ; on avait apporté du sable, on avait apporté du ciment, des briques ; et, le huitième jour, les murs rapidement poussés, comme quand on soigne bien une plante, venaient déjà à hauteur d’homme, les murs de la partie nouvelle, tandis que Rouge s’occupait de l’ancienne et là avait travaillé d’abord avec le râcloir, mais maintenant il maniait le pinceau.

Un gros bidon de fer posé à côté de lui était plein aux trois quarts d’une belle couleur brun-rouge, épaisse comme de la crème, qui sentait bon l’huile de lin ; lui, trempait dedans son pinceau large de trois ou quatre doigts, il allait avec son pin-