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LA GRANDE PEUR

vement. Bien qu’il tournât déjà le dos à Clou, il fermait encore les yeux comme pour s’empêcher deux fois de voir, tandis qu’il avait tiré la couverture jusque sur sa tête comme pour s’empêcher d’entendre, ne pouvant pas toutefois s’empêcher d’entendre à cause de la nuit partout rompue et traversée ; alors il sent encore le mouvement que fait dans son dos Barthélemy qui vient avec sa main, l’amène, la glisse sous sa chemise.

— Elles vont se casser les jambes… Eh ! le maître, le troupeau… Ou bien si vous vous en moquez ? Mais, en bas, qu’est-ce qu’ils vont dire ? À votre place, je n’oserais plus jamais redescendre… En tout cas, moi, je ne redescends pas…

Le bruit des cloches s’était calmé : il reprend, il reprend par places. Aucune bête n’a plus été tranquille cette nuit ; à peine étaient-elles arrêtées qu’il leur fallait repartir ; à peine étaient-elles en repos qu’elles étaient de nouveau chassées et poursuivies.

— Moi je ne redescends pas. Vous, ce sera quand vous pourrez, si vous pouvez…

Deux bêtes encore partent au grand galop ; et on ne savait pas ce que Clou faisait, pendant ce temps, sauf qu’il parlait ;